L’habitat durable en Europe : Fribourg, une ville solaire

L’habitat durable en Europe : Fribourg, une ville solaire

Capitale fédérale du Bade-Wurtemberg, Fribourg-en-Brisgau est aujourd’hui un modèle européen d'écologie. Non seulement la ville alimente toute l’Allemagne en panneaux solaires, mais elle compte deux écoquartiers : Vauban et Rieselfeld, dont la visite est devenue un passage obligé pour quiconque s’intéresse à l'aménagement durable. Comment cette tranquille bourgade de 215 000 habitants en est-elle arrivée là ? Midi:onze y est allé pour vous.

 

Du nucléaire au photovoltaïque

Sa position de modèle écologique, Fribourg-en-Brisgau la doit d'abord au nucléaire. Dans les années 70, la ville se voit cernée par les centrales de Fessenheim en Alsace, Philippsburg et Biblis en Allemagne, et s'en inquiète. Grâce à l'alliance de l'université et du monde paysan, elle devient alors un foyer de résistance au nucléaire. Une position que la catastrophe de Tchernobyl dix ans plus tard ne fera que renforcer : à la fin des années 80, Fribourg fait figure pour l'Allemagne toute entière de modèle dans la lutte contre l'énergie atomique. Un tel statut ne va pas sans responsabilités. Parmi celles qui incombent à la ville, la nécessité de trouver une alternative au nucléaire. Dès 1986, la ville envisage sa transition énergétique sur trois fronts : économies d’énergie, développement des énergies renouvelables, adoption de technologies efficaces. A la faveur de sa position géographique (le land du Bade-Wutemberg possède le plus fort taux d’ensoleillement d’Allemagne), Fribourg commence alors à développer l’énergie solaire, et accueille la première usine européenne de panneaux photovoltaïques : Solar Fabrik. Par ailleurs, la ville met en oeuvre sa politique de maîtrise de l’énergie via la promotion des transports doux (tramway, vélo, marche) et la construction de logements basse consommation. C’est l’acte de naissance du quartier Vauban.

 

Un immeuble dans le quartier Vauban à Fribourg

Ecoquartiers et écocitoyens

En 1992, dans le sillage de la réunification, l’armée française libère les casernes qu’elle occupait dans la ville depuis 1945. Le terrain de 4 hectares est d’abord squatté illégalement par des alternatifs, jusqu’à ce que la municipalité n’envisage d’aménager les lieux. En 1996, après un an de concertations, commence une vaste opération de rénovation des anciennes casernes et d’aménagement des 38 hectares alentour. Elle aboutira à la construction de 2 000 logements, dont un ensemble de maisons à énergie positive. D’emblée, les futurs habitants du quartier se fédèrent en Baugruppen (littéralement, «groupes de construction») pour définir ensemble le cahier des charges de leur parcelle. Leur objectif n’est pas seulement de construire des logements sains et moins gourmands sur le plan énergétique. La gestion des espaces verts et la question des transports sont au coeur de leurs réflexions. En effet, le quartier Vauban privilégie les déplacements doux. Les parkings sont situés à l’extérieur du quartier, les pistes cyclables nombreuses et les rues en forme de fer à cheval, afin de limiter la circulation automobile. Par ailleurs, la vitesse des voitures est limitée à 6 km/h, pour laisser la voie libre aux piétons. Enfin, depuis 2006, une ligne de tramway relie le quartier au centre-ville. Du coup, le quartier Vauban jouit d’un calme exceptionnel, d’où son plébiscite par les classes aisées (intellectuels et professions libérales), et les familles avec enfants.

 

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Le volontarisme de la municipalité

Parallèlement à la construction du quartier Vauban, la ville de Fribourg adopte dès 1996 un plan climat ambitieux, puisqu’il prévoit la réduction d’ici 2030 de 40% des émissions de GES. Pour y parvenir, la ville veut entre autres optimiser l’aménagement urbain et développer les réseaux urbains. Pour y parvenir, elle planifie l’érection d’un second écoquartier à l’ouest de la ville: le Rieselfeld. Situé sur un ancien terrain d’épandage, ce projet prévoit la construction de 12 000 logements sur un terrain de 70 ha. Avant même l’achèvement des travaux, il constitue déjà un modèle de planification urbaine. Volontairement dense (COS supérieur à 1), le Rieselfeld combine les éléments suivants : sobriété énergétique des logements avec des bâtiments basse consommation (65kWh/m²/an), traitement des eaux usées, utilisation des énergies renouvelables, volontarisme en matière de transports grâce à une ligne de tramway, des pistes cyclables, la limitation de la vitesse à 30 km et la création de spielstrassen ("rues de jeu"), la limitation des déplacements via de nombreux commerces de proximité (supermarchés, cafés) et équipements (médiathèque, école, église), mais aussi la mixité sociale.

Avec un tel volontarisme, nul doute que Fribourg n’atteigne bientôt ses objectifs de sobriété énergétique. Du reste, la ville mesure d’ores et déjà les bénéfices de ses choix en matière d’écologie: non seulement les écoquartiers de Vauban et Rieselfeld offrent une qualité de vie exceptionnelle, mais grâce aux 1 500 emplois créés dans le secteur du développement durable, le taux de chômage des Fribourgeois est exceptionnellement bas (environ 5%)…

Rieselfeld immeuble rouge