La nouvelle éthique des étiquettes

La nouvelle éthique des étiquettes

Que ce soit pour nous inciter à mieux maîtriser nos consommations d’énergie ou pour nous alerter sur les impacts environnementaux et sanitaires de ce que nous achetons, la réglementation mise de plus en plus sur l’information du public via l’étiquetage obligatoire. De l’étiquette énergie au diagnostic de performance énergétique, zoom sur un dispositif encore tâtonnant.

Comment mieux informer les consommateurs sur les impacts sanitaires et environnementaux de ce qu'ils achètent, tout en incitant les fabricants à mettre sur le marché des produits moins polluants ? Pour les pouvoirs publics, la solution à ce double défi réside dans l'étiquetage obligatoire. Inauguré avec l'étiquette énergie en 1995, le dispositif devrait s'étendre bientôt à presque tous les secteurs de l'économie… 

 

Coup de neuf sur l’étiquette énergie

Créée dans le but d’informer les consommateurs sur les performances énergétiques des appareils électroménagers et certaines de leurs caractéristiques (consommation d’eau, niveau sonore…), l’étiquette énergie va bientôt faire peau neuve.

A partir du 20 décembre 2011, elle sera remplacée par une version européenne – censée plus lisible dans la mesure où elle fait la part belle aux pictogrammes – et fera son apparition sur les téléviseurs, épargnés jusqu'alors.

Cette évolution est aussi destinée à rendre compte des performances énergétiques toujours plus grandes des appareils électroménagers : les classes les plus consommatrices (E, F et G) n’étant plus commercialisables, elles ont en effet cédé la place à une myriade de classes économes, de sorte que la nouvelle étiquette comportera pas moins de 4 A (de A+++ à A !). À se demander si le nouveau dispositif a été conçu pour informer le public ou pour l’inciter à la consommation…

 

Les aléas du diagnostic de performance énergétique (DPE)

Depuis le 1er janvier 2011, les agences immobilières en sont couvertes : le DPE est désormais obligatoire pour toute mise en vente ou location de logements. Cette estimation des consommations d’énergie d’un bien est d’autant plus déterminante dans les transactions immobilières que le montant du PTZ+ est évalué en fonction de cet indicateur.

Mais si l’enjeu du dispositif est bien de faire de la performance énergétique un argument de vente et un outil de valorisation patrimoniale, le mode d’évaluation des diagnostics soulève quelques doutes… Ainsi, une enquête de l’UFC Que choisir dénonçait en février dernier le caractère aléatoire des classifications effectuées par les diagnostiqueurs : « Sur 4 maisons visitées par 16 diagnostiqueurs : deux maisons ont été classées dans pas moins de 3 classes énergétiques différentes, une a été classée dans 2 étiquettes différentes, une seule s’étant vue attribuer la même étiquette énergétique par tous ces "professionnels". »

A défaut d’un mode de calcul plus rigoureux, le DPE risque fort de s’assimiler à une sorte de loterie… C’est pourquoi l’UFC demande l’adoption de mesures techniques pour fiabiliser les DPE et la possibilité de le rendre opposable entre l’acheteur et le vendeur. Suite à cet appel, la réaction de Nathalie Kosciusko-Morizet et Benoist Apparu ne s’est pas fait attendre. Dans un communiqué, la ministre de l’Ecologie et le secrétaire d’état au logement se sont engagés à organiser durant tout le mois de mars des réunions de consultation avec les fédérations de diagnostiqueurs ainsi que des acteurs concernés, afin de produire un premier bilan des travaux réalisés dès avril prochain…

 

Une étiquette sur la qualité de l’air intérieur

Longtemps resté le parent pauvre de la réglementation française, la qualité de l’air intérieur s’impose peu à peu comme un enjeu sanitaire. Pour réduire à la source les émissions polluantes de COV et autres, l’article 40 de la loi Grenelle prévoyait ainsi de « soumettre les produits de construction et d’ameublement ainsi que les revêtements muraux et de sol, les peintures et vernis et l’ensemble des produits ayant pour objet ou pour effet d’émettre des substances dans l’air ambiant à un étiquetage obligatoire à partir du 1er janvier 2012. »

Encadré par un décret et un arrêté ministériel en cours de signature, ce projet d’étiquetage devrait être applicable en janvier 2012 pour tout nouveau produit, avant d’être généralisé un an plus tard à l’ensemble des produits de construction et de revêtement, mais aussi des peintures et vernis disponibles sur le marché.

S’il s’agit là aussi d’inciter les industriels à de meilleures pratiques, on peut s’interroger sur la classification retenue – de A+ (pour les produits peu émissifs) à C (fortes émissions). Le consommateur, habitué à considérer C comme une valeur moyenne, saura-t-il interpréter les informations données sur l’étiquette ? A suivre…

 

Demain, une étiquette alimentaire ?

En réponse à une exigence de traçabilité toujours plus grande, l’article 228 de la loi Grenelle II envisageait de conduire sur un an une expérimentation « afin d'informer progressivement le consommateur par tout procédé approprié du contenu en équivalent carbone des produits et de leur emballage, ainsi que de la consommation de ressources naturelles ou de l'impact sur les milieux naturels qui sont imputables à ces produits au cours de leur cycle de vie. »

Dans le sillage du texte, plus de 230 entreprises se sont portées candidates pour expérimenter la nouvelle étiquette. 168 d’entre elles ont été retenues, dont 1/3 dans l’agro-alimentaire. A partir de juillet prochain, elles pourront ainsi tester la façon dont les consommateurs perçoivent le dispositif d’information, et mesurer la pertinence des différents supports de communication, leur format et leur lisibilité. Résultats espérés, selon NKM : « Nous attendons de cette expérimentation un engagement plus fort du consommateur. Car un consommateur bien informé peut s’engager, choisir ses produits autrement. D’autre part, cette expérimentation va renforcer le pôle de compétitivité du site France: l’entreprise qui se soucie de produire à proximité et qui travaille sur le cycle de vie du produit, travaille sur la compétitivité.»