Mot pour Mot : Biopiraterie

Mot pour Mot : Biopiraterie

Dédiée à la sémantique du développement durable, la rubrique « Mot pour Mot » se penche aujourd’hui sur la notion de « biopiraterie» , ou l’art d’annexer et de breveter le vivant pour en faire la propriété exclusive de quelques grands groupes…

A l’heure où la biodiversité s’est positionnée comme une des priorités du nouveau gouvernement, la biopiraterie tente de se faire connaitre à la faveur de Catherine Grèze, une députée européenne EELV (Europe Ecologie Les verts) qui s’intéresse de prés à cette notion méconnue et qui en a fait un des ses principaux champs de batailles au Parlement européen. Piraterie ? Loin de l’image de bandits des mers, ici la forme de banditisme ne se fait pas sur les eaux mais sur le « bio » c’est à dire sur le vivant.

Le « Collectif pour une alternative à la biopiraterie » propose sur son site cette définition : « La Biopiraterie désigne l'appropriation des connaissances traditionnelles des peuples autochtones sur l'usage des ressources génétiques sans leur consentement et sans partage des bénéfices liés à la valorisation des ressources. » En d’autres termes, des plantes aux propriétés riches deviennent objets de convoitise pour des firmes cosmétiques, pharmaceutiques et agroalimentaires (les biopirates) qui déposent des brevets sur des gènes ou des espèces pour s’octroyer des monopôles et l’exclusivité des bénéfices de la commercialisation. Ici, les pirates ne sont pas de petites communautés en marge du pouvoir central, mais au contraire de grands groupes intégrés, et qui participent pleinement à l’activité économique… Quelques chiffres qui donnent l’ampleur de la situation ? Selon Catherine Grèze, 90% du patrimoine biologique mondial est détenu par les pays en développement et 97% des brevets sont détenus par les pays industrialisés.

La première jurisprudence européenne de biopiraterie remonte aux années 1990. Présent en Asie du Sud-Est, le Neem ou margousier indien est connu depuis des siècles pour ses propriétés insecticides, médicinales et cosmétiques. La multiplication des brevets a entrainé naturellement une forte hausse des prix qui ont privé une partie de la population de son accès. A la suite d’une campagne d'envergure en Inde et en Europe, les brevets sur le Neem ont été retirés. Un exemple devenu cas d’école.

La biopiraterie, colonialisme d’un nouveau genre ? C’est en tout cas l’avis de Vandana Shiva, Prix Nobel alternatif en 1993 qui parle d’une « colonisation des savoirs ».