L’’activité humaine, nouvelle source d’énergie

L’’activité humaine, nouvelle source d’énergie

A l'approche du sommet de Durban sur la lutte contre le réchauffement climatique, les négociations ont repris le lundi 6 juin à Bonn. Mais alors que les émissions de gaz à effet de serre résultant de l’activité humaine sont aujourd’hui au cœur des débats, de nouvelles idées permettent d’envisager cette même activité humaine comme source d’énergie. De quoi confirmer la célèbre maxime de Lavoisier, "rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme".

 

Pédaler, marcher, conduire… Toutes ces activités sont émettrices d’énergie. Encore faut-il savoir la récupérer pour la réutiliser. Pour y parvenir, certaines sociétés aidées de scientifiques ont réussi à mettre au point des systèmes de récupération d’énergie originaux et prometteurs.

A Toulouse, une expérience vise à récupérer l’énergie produite par les piétons. Imaginée par Bertrand Nogarède, professeur d'université à l'ENSEEIHT (Ecole nationale supérieure d'électrotechnique, d'électronique, d'informatique, d'hydraulique et des télécommunications), cette innovation consiste à installer des dalles en ductal (béton très mince, résistant et écologique) sous le trottoir existant. Sous la dalle, dans une boîte en métal, un ressort enregistre les oscillations verticales (5 mm) créées à chaque passage d’un piéton. Un générateur semblable à une dynamo de vélo transforme ensuite cette énergie en électricité stockée dans une mini batterie. Cette dernière fournit assez d’énergie pour alimenter le réverbère situé à quelques mètres du trottoir. Installées fin mars sur l'esplanade François Mitterrand, ces dalles à récupération d’énergie profitent du passage quotidien de 80 000 personnes qui utilisent ce trottoir pour se rendre à l’entrée du métro Jaurès. C’est la société Viha Concept, spécialisée en Recherche-développement en sciences physiques et naturelles qui finance le projet et espère pouvoir commercialiser ses "trottoirs électriques" d’ici 18 mois.

 

Des voitures et des trains créateurs d’énergie

Sur le même principe, la société israélienne Innowattech récupère l’énergie générée par le passage des voitures. Pour y parvenir, il faut équiper le réseau routier de générateurs piézoélectriques. Ces matériaux sont utilisés dans de nombreux de domaines allant du sonar pour détecter des obstacles (conversion d’une onde acoustique en signal électrique) aux microbalances qui permettent des mesurer des masses très faibles (résonance électrique d’un disque de quartz). Soumis à des déformations mécaniques, ils répondent en générant un courant électrique. Les ingénieurs de la société ont ainsi placé à quelques centimètres de profondeur sous la route ces générateurs piézoélectriques. Ces derniers se déforment sous la pression exercée par le poids des voitures passant au-dessus. Ils créent donc un courant électrique qui est ensuite stocké dans des batteries. Après des tests réussis autour de l’aéroport de Ben-Gurion, un premier projet commercial a été lancé en 2010 avec la compagnie Italienne de génie civil Impregilo SpA. C’est l’autoroute entre Venise et Trieste qui profitera de cette innovation dès son ouverture en 2013. L’électricité produite sera suffisante pour alimenter tous les panneaux électroniques situés le long de cette route. Enfin, Innowattech a indiqué récemment avoir conclu un accord avec la compagnie nationale ferroviaire israélienne pour placer ces générateurs piézoélectriques sous les rails de trains autour de la gare de Haïfa.

Les deux-roues ne sont pas écartés de ce type d’innovations. Aux Etats-Unis, l’entrepreneur Jay Whelan a imaginé équiper les salles de sport de vélos d’intérieur à récupération d’énergie. Deux clubs de gym de New York ont été les premiers à s’équiper en 2008. Baptisés The Green Bike, ces vélos produisent environ trois kilowatts par séance d’entraînement pour un groupe de 20 coureurs. Une quantité d’électricité qui permet d’éclairer une maison pendant six mois. Seul bémol : l’investissement est important. Un club de gym doit ainsi dépenser 15 000 dollars pour équiper une salle de sport complète de vélos (20 unités) à récupération d’énergie. Mais ce choix peut s’avérer également intéressant en matière d’image auprès d’une clientèle de plus en plus sensible à la question environnementale.

 

Pédaler plus pour voyager plus

A l’extérieur, la récupération d’énergie sur les vélos étaient déjà effective depuis longtemps avec la dynamo. Pour aller plus loin, le designer américain Chiyu Chen a imaginé stocker sur des vélos de location, l’énergie produite par le cycliste dans des batteries fixées sur le guidon. Celle-ci est ensuite transmise, lorsque le vélo retrouve sa station d’accueil, à un réseau d’autobus hybride voisin. Des crédits sont accumulés par le cycliste en fonction de l’effort fourni sur le vélo et il peut ensuite se servir de ses crédits pour utiliser gratuitement le bus. Baptisée Hybrid2, cette idée est encore à l’état de concept.

En France, une expérimentation a permis de récupérer la chaleur émise par le frottement des trains sur les rails et la position souterraine du métro. Des conduits, construits pour l’occasion, récupèrent cette chaleur et permettent de réchauffer de l'eau et d’alimenter des conduits de chauffage d’un immeuble du 5ème arrondissement (rue Beaubourg). Si le projet est loin d’être réalisable pour tous les immeubles de la capitale (le coût de construction des conduits étant souvent très élevé et parfois impossible techniquement), ce projet devrait permettre de réduire de 33% les émissions de gaz à effet de serre par rapport à une chaufferie uniquement raccordée au réseau de chauffage urbain.