Une mer de plastique à Zurich

Une mer de plastique à Zurich

A Zurich, l’exposition « Out of Sea ? : the plastic garbage project » au musée du design aborde le cycle de vie du plastique à travers l’exemple des « garbage patchs », ces continents de déchets formés au large des océans. L’occasion de questionner l’impact sur la vie marine d’un matériau dont la longévité pose problème.

En 1997, le navigateur Charles Moore découvrait un continent de plastique de plusieurs millions de km2 au large du Pacifique. Depuis, on sait que des « Garbage patchs » se sont aussi formés sous l’effet des courants marins dans le Pacifique sud, l’Atlantique et l’Océan Indien. Spectaculaires, vertigineuses, ces poubelles flottantes ont très largement frappé l’esprit du grand public, jusqu’à devenir l’emblème d’un système de production fondé sur le gaspillage et l’obsolescence.

Les déchets plastiques et leurs conséquences sur les mers

D’où le parti-pris du Museum für Gestaltung (musée du design) à Zürich : en faire le point de départ d’une exposition didactique (et gratuite) sur les matières plastiques. Distribuée autour d’un vaste amas de bouteilles, vieux bidons, emballages, jouets, etc., dont certains n’auront servi que quelques minutes ou quelques secondes avant d’être jetés, celle-ci aborde son sujet via l’énorme quantité de déchets absorbés chaque année par les milieux marins – soit 6,4 millions de tonnes, dont 80% provient du continent. Non biodégradables, ces déchets tapissent le fond des océans ou flottent à la surface (pour 15% d’entre eux), et se décomposent en particules de plus en plus fines. Conséquence : quand ils ne les tuent pas, ils sont ingurgités par les animaux marins et entrent dans la chaîne alimentaire…

Pour mieux donner la mesure du phénomène, le parcours de l’exposition dresse une sorte d’archéologie du présent : face aux vidéos, photographies, œuvres d’art et documents montrant la manière dont le plastique affecte la vie marine, sont exposés les objets les plus familiers. Certains sont tout au plus légèrement corrodés par le sel, d’autres se trouvent réduits à l’état de micro-éléments qu’on prendrait presque pour du sable. Cette volonté de coller au quotidien est la grande force du Plastic garbage project : elle montre que ce sont nos comportements quotidiens qui font des océans une vaste décharge…

 

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Le plastique, un matériau omniprésent dans la vie quotidienne

Le second volet de l’exposition souligne davantage encore la causalité entre « garbage patchs » et modes de vie contemporains. Abordant le plastique comme un matériau (après tout, nous sommes au musée du design), il en explique la composition et les différents usages dans la vie quotidienne. Est ainsi rappelé que les polymères (autre nom du plastique) sont des rejetons du pétrole, et en sont énumérés les différentes formes, du polyéthylène au polyuréthane… Derrière l’opacité des noms et des formules chimiques, c’est tout notre quotidien qui s’égrène : bouteilles, emballages, textiles, CD et DVD, biberons, outils, etc. En Europe de l’Ouest en effet, 92 kilos de plastiques per capita sont consommés chaque année.

Que faire pour que ces objets n’aboutissent en fin de vie dans les océans, avec les conséquences que l’on sait ? C’est tout l’enjeu de l’exposition. En regard de chaque usage, sont évoquées des alternatives : plastiques végétaux, recyclage, upcycling, downcycling, cradle to cradle… En attendant un changement à grande échelle des modes de production, le musée propose même aux visiteurs un espace de recyclage. Et pour inciter le plus grand nombre à un changement de comportement, le Plastic garbage project sera ensuite convoyé à Hambourg et Copenhague… par voie maritime, bien sûr !