New Songdo City : la ville du futur a-t-elle de l’’avenir ?

New Songdo City : la ville du futur a-t-elle de l’’avenir ?

En Corée du Sud, une ville laboratoire numérique est en pleine construction. Edifiée d’ici 2020 sur une île artificielle, New Songdo City sera entièrement informatisée. Mais certaines questions restent en suspend sur sa finalité écologique et son intérêt social.
 
C’est le plus grand projet immobilier privé du monde. Pour un total de 25 milliards de dollars, des investisseurs coréens (Songdo International Business District) et américains (Gale International) vont ériger d'’ici cinq ans une ville pouvant accueillir 75 000 habitants et 300 000 travailleurs (la ville sera insérée dans une Zone Franche économique). Baptisée New Songdo City et située à 60 kilomètres de la capitale sud-coréenne Séoul, cette ville du futur est en construction depuis 2001 sur les 600 hectares d'’une île artificielle relié par un pont de onze kilomètres (lui aussi en construction). Ce projet fait partie avec 22 autres prototypes de villes de Corée du Sud du programme "Ubiquitus City" mené par les pouvoirs publics. Un programme qui prévoit d’'ériger des villes entièrement informatisées, à l’'image du pays, leader en la matière. L’'économie du pays repose en effet en grande partie sur son savoir-faire en matière de technologies de l'’information (IT). 85% des foyers de Corée du Sud possède un accès Internet haut débit (contre 50 % pour la France). Les coréens sont habitués à payer leurs achats avec leurs téléphones portables, et la formation par Internet (e-learning) est désormais habituelle dans les universités. C’est aussi en Corée du Sud que se tient le Séoul Digital Forum, sorte de Davos mondial des nouvelles technologies. Cette "priorité numérique" donnée par le gouvernement coréen devrait donc être poussée à l’'extrême dans les prochaines "Ubiquitus City". Ainsi, les puces numériques RFID qui permettent de tagger des objets seront massivement utilisées dans toutes les sphères de la société. La puce numérique permettra par exemple de repérer ou verbaliser un individu coupable d’'avoir jeté une canette dans une mauvaise poubelle. Mais si celle-ci est jetée dans la poubelle de recyclage appropriée, le geste rapporte alors des points, convertibles en bon d’achat. Ces puces numériques auront aussi la faculté d'’alerter les urgences en cas de chute d’un piéton (les sols des appartements seront sensibles aux pressions) ou d’'accident. Une même clé permettra de conduire sa voiture, d'’entrer chez soit, de payer son parking, ou de prendre le métro.

 

Pas si green que ça ?

Sur le plan de l’'urbanisme, New Songdo City sera un véritable patchwork mondial. Central Park, canaux vénitiens, quartier jardin de Savannah, Hôpital Américain John Hopkins, écoles Harvard trouveront place dans les quartiers de la ville. Quand à la préoccupation écologique, si les investisseurs mettent en avant les 40% de la surface promise en espaces verts (voir photo), on peut s'’interroger sur la part du développement durable du projet. Aucune indication quand à la production d'’énergie nécessité par cette ville qui se profile déjà comme une des plus consommatrices de la planète (et quid de la mobilité, point qui n’est pas abordé dans le projet). Autre point d'’interrogation, l’'absence de mixité sociale qu’entraînera New Songdo City. La luxueuse cité devrait faire la part belle aux cadres et CSP +. Enfin, quelle part donnée à la protection de la vie privée dans un lieu où chaque objet sera identifié numériquement, chaque geste sanctionné ou récompensé et chaque déplacement enregistrée et filmé par l’'omniprésence des caméras ? La perte de l’intimité est-elle le prix à payer pour mener une existence numérique ?

 

En bref, le progrès technologique est-il un progrès pour l'’humanité ? New Songdo City et la capacité de ses futurs résidents à s’adapter à ses règles devraient apporter certains éléments de réponse