Hacker la ville : Re:farm the city

Hacker la ville : Re:farm the city

A la croisée de l'art, l'agriculture et l'open source, le collectif Re:Farm the city expérimente depuis 2008 une nouvelle manière d'approcher la production de fruits et légumes en milieu urbain. Portrait.

 

Longtemps structurée autour de l’opposition ville/campagne, la production agricole se conçoit désormais comme un fait urbain – témoin l’essor des jardins partagés, fermes verticales et mouvements locavores. En 2008, ce désir de concilier vie en ville et production alimentaire donnait naissance à Re :farm the city .

On doit la genèse de ce projet, qui mêle art, agriculture et open source, à un graphiste portugais : Hernani Dias. Venu s’installé à Barcelone, le jeune homme décide un jour de faire pousser des légumes dans son appartement. Mais il part en vacances, et à son retour, tous les végétaux ont péri faute de soins. Hernani Dias décide alors de créer un système d’arrosage qui ne se déclenche pas automatiquement, mais lorsqu’il détecte, via un ensemble de capteurs, que la plante a besoin d’eau. Connecté à Internet, le système peut être contrôlé à distance.

Face au succès de son dispositif, Hernani Dias décide de créer un collectif informel au sein duquel se partageraient technologies et savoir-faire. Depuis, Re :farm the city a essaimé dans une petite dizaine de villes à travers le monde, dont Paris. Son ambition : proposer des outils software et hardware en open source à tous ceux qui souhaiteraient créer et gérer à distance de mini-fermes urbaines : systèmes d’arrosages, épouvantails, composts…

Bien sûr, la protection de l’environnement est l’un des piliers du projet, qui privilégie matériaux trouvés et recyclés, encourage à la production locale et à l’ensemencement de végétaux vernaculaires. Les fermiers de Re :Farm n’en investissent pas moins des modes de production résolument contemporains, tels que l’hydroponie. Surtout, ils sont friands de technologies récentes, et ont d’emblée ajouté aux outils traditionnels du jardinier l’Arduino, ce circuit imprimé distribué sous licence Creative Commons, dont raffole tout hacklab.

De fait, l’enjeu de Re :farm the city n’est pas tant de reverdir la ville que de bâtir de nouvelles communautés dont les valeurs et l’organisation doivent beaucoup à l’éthique « hacker » : collaboration et coopération, mise en commun des données, circulation libre des savoirs… C’est d’ailleurs pourquoi les fermiers qui nourrissent le projet se réclament du DIT (do-it-together) plutôt que du DIY (Do-it-yourself). A rebours de l’approche environnementaliste à quoi se résume souvent l’écologie, Re :farm the City conçoit d’abord celle-ci comme une autre façon de vivre ensemble et de partager les ressources. Bref, pour ces fermiers bidouilleurs, une ferme urbaine, c’est avant tout une expérience du partage et de l’en commun…